2020 Louis Claudel

Presque un siècle…
comme messager de la Bonne nouvelle de Jésus

Il y a quelques semaines, à son arrivée à l’EHPAD de Brienon-sur-Armançon, venant de la Maison de retraite de Pont-sur –Seine, le Frère Louis eut l’idée de mettre de l’ordre dans ses papiers personnels (des souvenirs de famille, des photos… mais aussi des traces du vécu dans les différents Prieurés FMC où il a été nommé : j’en ai compté 10 !).

Je lui ai proposé de reprendre comme base ce qu’il avait écrit il y a une vingtaine d’années… pour une année dite « d’approfondissement » : une vingtaine de Frères dont Louis, s’étaient retrouvés régulièrement pour des sessions de quelques jours au Prieuré de La Houssaye-en-Brie. C’était en fait une relecture de vie, bien sûr à la lumière de l’Évangile mais aussi à la lumière des engagements vécus par chacun. Des experts, amis du Fr Gilles Pillet (qui avait beaucoup de relations…), des prêtres comme Michel Pinchon, Gérard Bessière … avaient accompagné ce groupe. Le Frère Louis avait réécrit toute sa vie de sa fine écriture appliquée.

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Avant d’entrer chez les FMC en 1946 (Le Père Epagneul alors dominicain venait de fonder notre Congrégation en 1943), Louis avait déjà vécu plusieurs étapes dans les Vosges : La famille à La Bresse, le Petit Séminaire, le Grand Séminaire à St Dié, interrompu une année au moins par un travail manuel pour se cacher et échapper au STO (Service du Travail obligatoire en Allemagne)…

Il fait donc son Noviciat à la Houssaye-en-Brie (Seine-et-Marne) en 1946-1947, à la « Maison-Mère » avec un Maître des Novices dominicain « prêté » (si on peut dire) au Père Epagneul ! Ensuite il complète ses études de théologie au Couvent dominicain du Saulchoir, en Seine-et-Oise, puis il est ordonné prêtre le 29 juin 1948 à St Dié, son diocèse d’origine. La Congrégation n’étant pas encore officiellement reconnue par Rome, il attendra un an pour émettre ses vœux religieux de F.M.C.

A l’offertoire qui va suivre bientôt, il y aura une procession avec des objets symboliques pour évoquer tout ce qu’il a fait, tout ce qu’il a été au cours de sa longue vie . (1)

Comme beaucoup de Frères de sa génération, le Frère Louis a fait en tant que FMC un grand tour de France des Prieurés avec des étapes qui ont duré une dizaine d’années… (Certains parmi les Frères sont allés beaucoup plus loin…le Togo, le Burkina, le Bénin et le Brésil !)

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Comment évoquer en quelques pages une telle richesse de vie…et si longue ?

Il y aura aussi à l’offertoire de cette messe du pain et du vin… comme à la Cène de Jésus avec ses disciples...
Les symboles de la joie familiale autour de la même table, le même Pain partagé. (Le Frère Louis avait demandé à l’évêque de St Dié la permission d’entrer dans une communauté religieuse où on partage tout, à commencer par le pain quotidien).
Le vin de nos fêtes mais aussi quand il est rouge…il nous fait penser au sang versé.

Le Frère Louis avait participé de ses mains (avec la pelle et la truelle) à la construction du Prieuré des Frères quand ils l’ont construit à Vimory (dans le Loiret).

Il a eu la chance de partager les grandes joies de votre famille : les mariages, les baptêmes (je crois même qu’il en a célébré lui-même beaucoup en tant que prêtre…)

Hélas, nous n’oublions pas les grandes peines et tous ceux qui sont partis avant nous.
Même s’il n’avait que 2 ans et demi quand son papa est décédé, j’imagine que ce manque l’a influencé toute sa vie…
Et ce très grave accident de voiture d’août 1966 où son frère Léon Claudel et sa fille Germaine de 17 ans (venant voir Louis (« Tonty » comme on disait dans la famille) sont décédés tout près de Vimory !

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Dans les départements où il a vécu : Les Vosges, la Seine-et-Marne, la Hte Garonne, l’Aisne, l’Oise, le Loiret et l’Aube… sa priorité a été les gens en difficulté, les malades, les enfants en retard scolaire, les migrants portugais à une époque où ils arrivaient nombreux, les personnes en recherche de la foi (il baptisera une cinquantaine d’adultes…).
Pour s’insérer dans un milieu, il n’hésitera pas à prendre un travail professionnel, même temporaire : maçonnerie (pour construire le Prieuré de Vimory (Loiret) par exemple, binage des betteraves, transport scolaire pour les IMP (2) : ce qui le mettra en contact avec des jeunes handicapés et leurs éducateurs…

Je citerais un petit exemple pour montrer que le « M » de « Missionnaire » qui est dans notre nom (FMC) était la lettre la plus importante pour lui : Les derniers jours à l’EHPAD de Brienon… un couple de Troyes (dont le fils avait été amputé d’une jambe à l’âge de 20 ans suite à un cancer) est venu le voir : (leur fils - très malade - avait voulu se préparer au baptême et à la communion avec Louis avant de mourir). Une mémoire extraordinaire lui permettait de garder facilement des liens. (3)

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J’aurais dû commencer par la toute première étape de sa vie bien significative des racines chrétiennes de la famille Claudel : son baptême. La date est facile à retenir puisque c’est la même que celle de sa naissance : le 25 décembre 1921 ! Né à 1 heure du matin, son père, avec sans doute le parrain et la marraine le conduisit en fin de matinée à l’église pour que Mr le Curé le baptise après la messe de 11 heures !

En conclusion, je vous confie la parole qu’il avait fait imprimer en 1948
sur l’image-souvenir de son ordination presbytérale :

« Porter à nos frères ruraux le Christ seul Sauveur, sa Vie, sa Parole, son Amour »

Fr Jean-Yves HELAINE
FMC
(89210 Brienon-sur-Armançon)

 

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N.B. : La feuille de lectures et de chants pour ses obsèques à Romilly avait été préparée depuis longtemps par le Fr Louis lui-même, avec l’aide de son équipe d’accompagnement des malades.
Il ne restait plus à mettre sur la feuille que le jour et l’heure !

(1) - Ce projet de vie de Louis, jeune religieux-prêtre, était bien dans la spiritualité de l’Église de France dans l’après-guerre : voir toutes les initiatives missionnaires qui se sont développées à ce moment là : la Mission de France, la mission ouvrière St Pierre-St Paul, les Prêtres ouvriers, les Petits Frères du Père de Foucauld…
Le Père Epagneul évoquait souvent ce dynamisme créateur dans l’Église de France… au moment où lui-même lançait un appel (en 1943) (par un tract que Frère Louis avait reçu) pour créer les Frères Missionnaires des Campagnes.

(2) : IMP = Institut médico-pédagogique

(3) – Le Frère Louis a pu rester dans sa chambre habituelle à l’EHPAD jusqu’à son dernier souffle. De nombreuses personnes l’ont accompagné pendant des heures et des jours, récitant les psaumes du bréviaire avec lui, le faisant manger et boire.
Sauf les tout derniers jours, il suivait l’office avec sa grosse loupe, prenant son tour pour lire un verset.
Il disait aussi le chapelet par téléphone avec les personnes qui n’avaient pas la possibilité de venir le voir.

Ceux et celles qui l’ont accompagné jusqu’au bout, en plus des FMC de Brienon (Yonne) étaient surtout des personnes venant de l’Aube, du secteur de Romilly-sur-Seine, Pont-sur-Seine (une heure de trajet pour Brienon) avec qui Louis accompagnait ces 20 dernières années 4 maisons de retraite. Nous les remercions vivement de l’avoir aidé à rester jusqu’au bout dynamique dans la mission.