Article de Sr Thérèse-Marie Dujardin dans le bulletin des Soeurs des Campagnes "Portes Ouvertes", n°72, 2011.
Sœur Marie-Françoise Clavel (18 octobre 1938 - 21 septembre 2010)
Sa famille :
Marie-Françoise est née au Villaret en Lozère. Ses parents étaient agriculteurs. Elle avait quatre frères et deux sœurs, dont l’une est décédée enfant (vers 5-6 ans ?). L’un de ses frères est prêtre « Fidei Donum » au Pérou.
En pension dès l’âge de six ans, elle est revenue travailler à la ferme tout de suite après l’école primaire. Très tôt, sa maman lui donna la responsabilité de l’intendance de la maison. Pendant ce temps elle a suivi des cours par correspondance et quelques stages de culture générale à la ville voisine et fait connaissance de la JOCF ; ce fut l’occasion pour elle d’une découverte du Christ. Elle n’a pas continué dans ce Mouvement ; voici ce qu’elle raconte : « Qu’un jour, en faisant la cuisine, elle a éprouvé la présence du Seigneur avec cet appel : Tu seras à moi, et à moi pour toujours. » Depuis ce jour, dit-elle, l’Amour du Christ fut plus fort que tout autre amour. Et elle s’engage dans la JACF.
C’est le 7 octobre 1961 qu’elle entre au Postulat des Sœurs des Campagnes.
Son parcours dans la Congrégation :
Après sa première Profession, le 2 octobre 1963, elle est envoyée à St Martin s/Ouanne pendant une année, puis à St Augustin de 1964 à 1968 et réside ensuite à Lumigny de 1968 à 1975.
Là, elle s’engage fortement auprès des jeunes avec le MRJC et d’autres organismes pour les jeunes en difficulté. Elle n’hésite pas à les rencontrer dans leurs divers lieux où ils se retrouvaient. Années difficiles où les orientations du Mouvement n’étaient pas toujours claires, mais elle voulait faire confiance aux jeunes, organisant rencontres et camps avec eux. Pour cela, elle passa le BAFA, puis le DEA.
En 1975-76, elle fait l’année d’étude au Studium de Toulouse et réside à Brax ; Je me souviens d’une remarque de Sr Claire, qui aidait les étudiantes dans la rédaction de leur travail : « Alors que Sr Marie-Françoise n’a pas fait d’études longues, c’est elle qui exprime le mieux ce qu’elle découvre de la théologie ; elle est profonde… »
Après cette année, elle retourne à Lumigny, toujours engagée avec les jeunes.
De 1980 à 1981, elle passe une année à Lombreuil, puis arrive en septembre 1981 à St Saturnin, où elle restera jusqu’en septembre 1998. C’est là que, personnellement, je l’ai vraiment connue.
Elle a eu au début une certaine difficulté à s’adapter. Elle a commencé à chercher du travail comme Aide-Ménagère, puis est entrée à l’ADMR où elle appréciait les rencontres avec les collègues et les journées de formation.
Et puis son souci des jeunes ne l’a pas quittée. Beaucoup de jeunes adultes aujourd’hui sont prêts à en témoigner.
De santé fragile, elle a subit pendant ces années là, deux opérations : fibrome et thyroïde, qui la laissa sans voix pendant quelques temps. Il s’en est suivi des périodes de dépression comme elle le dit dans sa « Radioscopie » de Chronique n° 228 de septembre 2004.
Liens avec sa famille :
Très attachée à sa Lozère natale, elle nous emmena, les cinq Sœurs du Prieuré, dans sa famille pendant trois jours. Elle nous fit découvrir l’élevage de brebis de son frère : le lait est récolté pour le fromage, un autre de ses frères travaillait dans l’une des raffinerie du Roquefort.
Avec sa sœur Thérèse, ce fut la découverte de l’Aubrac, puis de la magnifique grotte souterraine de l’Aven Armand.
Peu de temps après cette bonne visite, nous apprenions par un coup de téléphone, tôt le matin, le décès subit de la belle-sœur qui tenait la ferme. Elle en fut très affectée et dû faire un choix difficile. Son frère était seul avec deux garçons adolescents ; la fille aînée venait de se marier et attendait un bébé. L’entourage ne faisait que lui répéter « il faut que tu viennes près de ton frère. » Heureusement, la famille a réagit autrement : Thérèse qui n’était pas loin, décidait « je viendrai faire de la cuisine ; une belle sœur s’occupera du linge, et Marinette tu viendras une fois par mois faire du ménage. » Ce qui s’est vécu pendant un an ou deux.
Nous avons aussi bénéficié des séjours en France de Joseph, son frère prêtre, nous ouvrant aux problèmes de l’Amérique Latine. Avant d’être au Pérou, il avait dû quitter clandestinement l’Argentine où il était menacé.
A Ligueil :
C’est en 1998, qu’elle quitta le Berry pour la Touraine. Un prieuré était fondé à Ligueil avec la mission d’accueil de jeunes, ce qui la réjouissait.
Elle y est restée dix ans, continuant son travail à l’ADMR, participant aux manifestations de la vie locale, et aux rencontres de l’équipe CMR, comme l’a rappelé Sr Denise dans « Chronique » de décembre 2010.
C’est en 2008, que son état de santé exigea qu’elle rejoigne le Centre Desfontaines à Quincy s/ Sénart où elle a vécu le grand Passage, le 21 septembre 2010.
Sa vie spirituelle était simple et profonde ; elle tenait beaucoup à la vie fraternelle, à la liturgie, mais aussi au cœur à cœur avec le Christ comme elle l’a exprimé plusieurs fois.
Ainsi dans « Portes ouvertes » n° 71 de novembre 2010, elle exprime tout ce qu’elle voit de positif autour d’elle et dans un courrier à ses Sœurs elle dit : « les jours de dialyse, je me lève à 5 h. ½, je vais prier à la chapelle, je chante aussi tout bas « les mains ouvertes » en pensant à tout le monde, à notre congrégation, nos lieux d’insertion, toutes les personnes de la maison. J’aime bien chanter également « Jésus, me voici devant Toi », avec le 3ème couplet :
« quand viendra-t-il ton Jour, ô mon Dieu
où j’apercevrai ton visage
Tu seras là, c’est merveilleux,
Les bras ouverts sur mon passage. »
C’est ainsi, qu’à travers joies et épreuves, elle a fait l’expérience de ce qu’était la fidélité, comptant sur la fidélité et la miséricorde du Seigneur.
Sr Thérèse-Marie Dujardin