Frères Jean Eluère et Bruno Journet                  12 mai 2023 - Homélie

Isaïe 55, 9-13 ; psaume 64 ; Matthieu 5, 3-10 (Béatitudes)

C’est dans un cadre de montagne que Jésus proclame les Béatitudes : Heureux les pauvres, heureux les doux, les affligés…. Béatitudes qui sont à la première page de la Règle de vie des Frères Missionnaires des Campagnes, programme de toute notre vie. Béatitudes qui sont représentées dans les vitraux de la chapelle du Prieuré Saint Martin à La Houssaye.

Les Béatitudes, chemin de sainteté, « comme la carte d’identité du chrétien » dit le pape François. Je le cite :

« Nous sommes enveloppés d’une grande nuée de témoins qui nous encouragent à ne pas nous arrêter en chemin. Et parmi eux, il peut y avoir notre propre mère, une grand’mère ou d’autres personnes proches. Peut-être leur vie n’a-t-elle pas toujours été parfaite, mais, malgré des imperfections et des chutes, ils sont allés de l’avant et ils ont plu au Seigneur…J’aime voir la sainteté dans le patient peuple de Dieu : chez ces parents qui éduquent avec tant d’amour leurs enfants, chez ces hommes et ces femmes qui travaillent pour apporter le pain à la maison, chez les religieuses, les religieux âgés qui continuent de sourire… »

Familles de Jean et Bruno, Frères et Sœurs, amis, membres de la fraternité missionnaires, ce matin, laissons-nous interpeller par cette Parole de Dieu pour accueillir et célébrer la vie de nos frères, Bruno et Jean.

  • L’un et l’autre, de racine agricole, ont aimé la terre, la nature, la création.

« La pluie et la neige qui descendent des cieux, dit Isaïe, n’y retournent pas sans avoir abreuvé la terre, sans l’avoir fécondée et l’avoir fait germer. » L’un et l’autre, Jean et Bruno, à Crancey, à La Houssaye, à Brienon, ont travaillé la terre, avec une approche quelque peu différente du jardin, mais avec la joie, la fécondité de la récolte. Sur les photos des faire parts, nous voyons la main de Jean qui caresse la terre ; nous voyons les mains de Bruno qui rapporte des légumes, certainement pour une bonne cuisine dont il avait l’art.

« Tu visites la terre et tu l’abreuves ; tu la combles de richesses. » dit le psaume 64.

  • L’un et l’autre ont vécu la fraternité, avec d’autres, en communautés.

Jean a connu les débuts du Prieuré de Pibrac, près de Toulouse, travail du verger, de la vigne, du jardin…Ensuite, partout, principalement dans le sud de l’Aisne, il travaillera et s’engagera dans la défense des ouvriers agricoles, notamment auprès des immigrés, les portugais, et aussi des gitans et gens du voyage.

Bruno et moi, nous avons vécu nos premiers pas ensemble dans la communauté de Boulogne sur Gesse, proche des Pyrénées. C’était peu après le Concile, peu après mai 68, une période forte dans la démarche de l’action catholique, avec des équipes d’enfants, de jeunes et d’adultes, et avec beaucoup d’entre eux, le temps de belles randonnées dans la montagne pour découvrir la création.

Au Neubourg, Dans l’Eure, Bruno a travaillé dans un garage, période qui s’acheva par un dur accident, un grand tournant. Il vient ici à La Houssaye, membre du Conseil Général de la Congrégation, pour l’économat au service des Frères, France, Afrique, Portugal, Brésil. Dès cette période, 1986, ce fut un long chemin de souffrance : des opérations, traitements, handicaps, dure souffrance physique et au-delà, un certain calvaire et jusqu’au bout, sans grand discours, mais abandon, confiance, dans la proximité des frères, famille, amis…

Jean a aussi connu la souffrance ces dernières années, sans négliger le jardin, sans perdre sa grande mémoire : s’intéressant, écoutant, et sachant aussi parler pour détailler bien des aventures et événements.

« Heureux les affligés, car ils seront consolés. » Le Pape François commente : « Trouver que la vie a un sens, en aidant l’autre dans sa souffrance, en comprenant ses angoisses, en ayant le courage de partager et soulager la souffrance des autres. ».

Voilà la vie de deux Frères, Jean, Bruno ; deux disciples-missionnaires, sur un chemin de sainteté, un chemin éprouvant, un chemin parfois crucifiant ; mais un chemin fécond où le Christ Ressuscité s’est fait proche, comme à Emmaüs. Aujourd’hui, nous aimons rendre grâce pour leurs vies données, avec joies et fragilités. Au cœur de nos vies quotidiennes, familles, communautés, tous nos lieux de vie, dans la société comme dans l’Eglise, ils nous invitent à aller de l’avant avec d’autres, à plaire au Seigneur, à vivre la fraternité au quotidien, ans la paix, la sérénité.

« Heureux les artisans de paix », ceux et celles qui acceptent chaque jour le chemin de l’Evangile.

Frère Michel Yverneau