Nous évoquons quelques aspects de l’itinéraire du Frère Guy, aidé en partie par un récit réalisé par lui-même.

Frère Guy est né à Paris le 22 mai 1924. Son père est ‘marchand de couleur’ en gros (quincaillerie, peinture) ; sa mère malade est loin de la maison. L’enfance se passe avec la grand-mère, oncle, tante et surtout les cousins. Vie de famille très agréable : sévérité et grande liberté, dit-il; une vie religieuse très pratiquante, mais pas mal de gestes nous ennuyaient.

Paris fut pour mon enfance la vie morose ; et nous ne pensions qu’à la rigolade. Par contre, la vie à Grandvilliers (près de Beauvais) fut un enchantement : jardin, pré et bois…contact avec la nature, pêche, chasse, cueillette de toutes sortes : mûres, champignons, escargots, pissenlits, promenade, mer, vélo, tennis, rucher, volailles et lapins, jardinage…C’était la belle vie.

L’adolescence va être perturbée. En 1938, à la mort de sa grand-mère ; Grandvilliers est vendu, et ses parents achètent une petite propriété en Seine-et-Marne : le Moulin Vinet…séparation avec son frère ainé qui part en sanatorium atteint de tuberculose…puis la guerre et l’exode vers Mazamet où il trouve, après bien des péripéties, un havre de paix et d’amitié dans une famille protestante. A la libération, après son bac, Guy s’engage dans la division Leclerc (conducteur de char) ; il y reste jusqu’à la fin de la guerre.

Durant cette période, avec une bande de copains anciens scouts, il rencontre un certain Père Christian qui se dévoue à Villejuif : petit baraquement, chapelle en bois, familles pauvres ; avec lui il anime un patronage.

C’est avec ce service que je découvre petit à petit que la religion est une foi. Que Dieu n’est pas le centre de cette religion, mais Jésus-Christ. C’est là qu’avec les autres, je me pose la question de la vocation sacerdotale et religieuse. Nous serons sept à nous consacrer à Dieu.

La flamme prise au cierge pascal nous rappelle la lumière reçue au baptême, la vie plus puissante que la mort.

1-Refrain : ta main me conduit

Après réflexion, il entre en 1947 chez les Pères Blancs, à la stupéfaction de sa famille. Il y reste cinq ans. D’abord en Bretagne où il découvre le goût des études, le sport et la mer… Puis en Algérie où il souffre trop du climat. Il lui est conseillé d’aller voir les Frères Missionnaires des Campagnes.

Accueil extrêmement gentil, mais déconcertant ; ‘faites un stage en ferme et revenez dans un an’…J’en trouve un par hasard au Pays Basque. Tout près de l’abbaye de Belloc. Stage très dur…A Noël je décide d’aller à Pibrac passer deux jours. Au restaurant je mange un demi poulet. Je ne sais pas ce que ce séjour me réserve. J’ai bien fait. La veille de Noël, il n’y a que des pommes de terre en robe des champs et une pomme…Je repars en ferme pour sept mois…Enfin fin août 1953 j’arrive en mobylette au noviciat à La Houssaye. La mobylette est immédiatement confisquée.

Venant du diocèse de Paris, avec lequel je n’ai rien eu à faire, je resterai parisien toute ma vie…ce qui m’a toujours déplu…Mes racines réelles sont en Picardie, en Seine-et- Marne, à Paris, en Afrique du Nord, au Pays basque.

Après le noviciat à La Croix-sur-Ourcq frère Guy émet sa Profession le 29 mai 1954. Il poursuit des études à Saint Sulpice (Oise), à Montsoult avec les Oratoriens et à l’Institut Catholique de Paris. Il est ordonné prêtre 28 juin 1957 et commence à Saint Sulpice un ministère de pastorale paroissiale ordinaire jusqu’en 1966. Heureusement le concile se pointe et un travail d’analyse s’accomplit avec les enquêtes Boulard. Frère Guy est également chargé de suivre les jeunes frères-prêtres de la congrégation.

Les frères sont en insertion dans des paroisses voisines. Cela permet de très bons contacts avec des curés voisins. Les réunions de doyenné ne vont pas loin et ne volent pas très haut. Les repas sont somptueux.

En pensant à son engagement religieux-missionnaire et au ministère accomplit nous déposons la Règle de vie des frères et une étole.

2-Refrain : ta main me conduit

En 1966 Frère Guy est envoyé au Neubourg, il y reste jusqu’en 1974. Les espoirs sont immenses ; avec la fin du concile il y a du pain sur la planche. Une pastorale d’ensemble se met en place : village centre, regroupement des catéchismes, Conseil de secteur, responsabilités diverses, aumônerie CMR…et dans la communauté : études, engagement syndical.

Je prends un travail à mi-temps. Chauffeur. Cela me fait un bien fou…Libération d’une pastorale envahissante et de plus en plus insoluble. Connaissance d’un milieu par un autre angle de vue.

1974 je quitte le Neubourg pour une année sabbatique que je souhaite. La pastorale ordinaire m’engloutit.

Le Plateau du Neubourg est une région pilote, pleine de vitalité…Ces années au Neubourg m’ont fait aimer une région fière de son identité normande, de ses paysages, de ses produits. Je la quitte a regret pour cela et pour la proximité de la mer où j’allais souvent me détendre.

Après une année où il se forme aux techniques audio-visuelles, frère Guy est nommé au service Diocésain de la catéchèse du diocèse de Meaux. Durant cette période (1975-1987) il visite beaucoup paroisse, parents, forme et anime une équipe diocésaine, et va dans un centre de myopathes. Il découvre une autre manière d’être prêtre plus liée aux activités d’éveil et rencontre des laïcs qui répondent aux appels qu’on leur lance ; heureux de partager une responsabilité d’Église.

Il me semble que ce qui vaut pour la catéchèse devrait valoir pour l’animation des paroisses. Une Sœur des Campagnes qui est au service diocésain des ADAP fait la même constatation. Nous nous en ouvrons à Mgr. Khuen. C’est une piste qui l’intéresse et il nous demande de constituer un groupe de réflexions…d’où la création d’un Service de Pastorale Rurale qui aura pur mission de mettre en place une pastorale d’accompagnement en zone rurale. Les prêtres intervenants et accompagnateurs partagent l’exercice de la charge pastorale avec des équipes de laïcs…une dizaine de secteurs sont mis en accompagnement.

La découverte de la Bible et le partage de la Parole ont éclairé sa vie. Nous déposons sa Bible.

3-Refrain : ta main me conduit  

Un accroc de santé en 1986 l’oblige à prendre une année de repos. Il retrouve en 1987 le diocèse d’Evreux à Canappeville où il s’engage à nouveau dans la pastorale d’accompagnement, dans le diocèse et en participant à une équipe de la congrégation en ce sens appelée ESPER (1995-1997). Il limite les responsabilités. On se souvient toutefois qu’il est souvent demandé pour des animations avec ses marionnettes par lesquelles il fait passer des messages.

En 1998 il rentre en maison de retraite à Bernay (Eure) tout en gardant des activités (équipe salésienne, fraternité des malades, rosaire). A la suite de la fermeture de la maison de Bernay en 2013), et après un an à la maison de retraite du Neubourg, il rejoint l’EHPAD saint Loup à Brienon (Yonne) en 2014 où il décédera au début de sa 100ème année le 3 juin 2023. De plus en plus fragile, il participe à quelques activités communautaires et prie l’Office à l’aide de l’ordinateur.

Créatif toute sa vie, chacun se souvient de son humour, de ses dessins, de ses nombreuses tapisseries pour les frères et le personnel de l’EHPAD…, de la clarté de ses écrits pour rendre accessible la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ.

Ce qui m’intéresse ce sont toutes les avancées de l’Église en France, grâce au Concile, aux synodes diocésains, aux initiatives de toutes sortes. L’espace rural est mon espace de vie.

Nous apportons une de ses tapisseries pour évoquer les liens tissés, les joies d’une histoire fraternelle

4-Refrain : ta main me conduit  

Frères  Jean-Louis Lejay et Jean de Flaujac