1932-2008
Le Fr Yves-Henri Denis de Bonnaventure est né le 24 avril 1932 à Aytré, à 5 Kms de La Rochelle (Charente-Maritime). Il gardera toute sa vie le goût des grands espaces et des larges horizons... Au cours de ses études classiques au Collège de Paimpol, il sent monter en lui le désir de l’aventure maritime. Deux ans de navigation le préparent à faire son service militaire dans la marine nationale, à l’époque de la guerre d’Algérie.
Le retour à la vie civile s’accompagne du désir de se mettre au service des autres, et comme il l’exprime lui-même dans la « radioscopie » parue dans Chronique de juin 2008 : « Je ne voulais pas être prêtre. En entendant parler des Frères Missionnaires des Campagnes, j’ai pensé pouvoir vivre en milieu rural, en laïc religieux dans le monde ».
Entré dans la Congrégation des Frères Missionnaires des Campagnes le 11 novembre 1959, il fait sa profession perpétuelle le 5 septembre 1965 à Beaumont en Véron (Indre et Loire). Les paroles bibliques qu’il a choisies pour l’image-souvenir de son engagement sont révélatrices de sa sensibilité spirituelle : « Vers les eaux du repos Il me mène pour y refaire mon âme » et « Par la mer passait son chemin, son sentier par les eaux profondes... »
Après les années de formation à la spiritualité biblique, liturgique et missionnaire de la Congrégation et des stages de travail dans le Vaucluse, l’Eure, la Seine-et-Marne, il fait un premier séjour à Boulogne-sur-Gesse (Haute-Garonne) où il travaille comme maçon dans les villages alentour.
Dans la radioscopie déjà mentionnée, il parle des années de travaux saisonniers, où, avec Fr. Charles-François Mansuy, ils suivaient les gens du voyage en caravane.
Puis il vécut 18 ans à Ille-sur-têt (Pyrénées-Orientales) au Prieuré, avec un travail salarié dans le maraîchage et l’arboriculture, jusqu’à sa retraite professionnelle ; puis 5 ans en Ariège, au Prieuré du Fossat.
Enfin, en 1998, c’est son retour au Prieuré de Boulogne sur Gesse où il est resté jusqu’à son décès subit le 31 octobre 2008.
A Boulogne sur Gesse, il continue à lire beaucoup et à se tenir au courant des événements du monde. Peu désireux qu’on parle de lui et évitant toutes les situations qui lui auraient donné l’impression d’être mis en avant, Fr Yves-Henri se sentait très à l’aise parmi les gens simples, ceux qui se reconnaissent « petits » et qui disent sans détour ce qu’ils pensent.
Il cachait sous un humour parfois grinçant mais qui visait juste, sa culture littéraire, la richesse de son expérience humaine et sa vive sensibilité aux marques d’amitié et d’affection.
Durant les années passées avec lui, j’ai toujours sollicité et apprécié son bon sens et la sûreté de son jugement spirituel quand j’hésitais devant des décisions à prendre, concernant la pastorale du Secteur ou la confiance à accorder à une personne ou à un groupe.
Quand il sentait le témoignage évangélique en cause, il ne se dérobait jamais. Certes, comme tout être humain, il avait aussi ses faiblesses ; mais la force de la vie religieuse c’est d’être solidaires, dans un chemin d’humilité qui va, selon l’expression si juste du Père Rondet, jésuite, « de la sainteté désirée à la pauvreté offerte ».
Lors de la célébration de son passage « de ce monde au Père », un de ses neveux et filleul faisait l’unanimité de ceux qui l’entouraient dans l’église de La Houssaye-en-Brie (S.et M.) le 4 novembre avec ces mots concernant celui qu’ils appelaient "Oncle Yvon" : « Il était fier et content de nous montrer la terre où il travaillait ou la montagne qui l’entourait. Il était fier et content de nous présenter ses compagnons de travail et tous les gens simples qu’il côtoyait tous les jours : paysans, ouvriers, gens du voyage... Il ne nous racontait pas l’Évangile, il nous racontait ce qu’il vivait et c’était l’Évangile ».
Des objets symboliques ont été alors déposés sur son cercueil :
- La casquette de marin : qui évoque sa soif des grands espaces et les ports où il avait fait escale en Afrique, au Moyen-Orient, en Asie... mais aussi la passion de l’au-delà des mers qui l’a toujours habité.
- le sécateur : qui évoque sa vie de salarié de l’agriculture. Des années durant, il a taillé vignes et arbres fruitiers...
- la caravane : malgré son attachement à sa culture et à sa famille naturelle, il a su s’ouvrir à la famille des gens du voyage dont il a aussi partagé la vie et le travail.
Frère Jacques Dentin