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Sans bruit, son visage reflétant la paix, Fr. Dominique Champault s’en est allé le 3 août 2007 en fin d’après-midi... Il avait 81 ans.
Il a été entouré jusqu’au bout par Fr. Paul Morel, par des membres de sa famille et des Frères qui passaient le voir, par le personnel soignant de la maison. Le matin de son décès, il a encore pu communier, conscient de sa démarche.

C’est "l’Heure"... "Je passe à la rencontre vers notre Père"... "Foule immense de tous ceux qui sont dans la paix, la lumière, la joie, les béatitudes"

Dominique votre Frère

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Ses obsèques ont été célébrées le 7 août, veille de la St Dominique, en l’église de La Houssaye-en-Brie (Seine-et-Marne) où se trouve la maison-mère de la Congrégation des Frères Missionnaires des Campagnes.
Le matin, une célébration a eu lieu à la chapelle de la maison de retraite de la Providence à Sens où il résidait depuis 1995.

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BIOGRAPHIE


Né le 18 mai 1926 à Eve (Oise)

A fait ses premiers voeux chez les Frères Missionnaires des Campagnes le 2 octobre 1949

A été ordonné prêtre le 29 juin 1961


Frère Dominique est l’un des tout premiers Frères de notre congrégation. Il a connu ainsi les temps de la fondation. Profès perpétuel en 1953, il est ordonné prêtre en 1961.
Il est alors nommé à Charny (Yonne) durant neuf ans puis à Chateaumeillant (Cher) durant seize ans. Il sera à Pommier de Beaurepaire dans l’Isère durant huit ans et enfin à Sens (Yonne) durant douze ans.
Sans doute le reconnaîtra-t-on à travers des traits évoqués au jour de l’adieu à Sens et à La Houssaye en Brie...

"Courbé amoureusement, passionnément, obstinément un outil à la main dans son jardin... mais le front relevé, l’oeil vif, le regard attentif, à l’écoute de qui venait à lui.
Empressé, délicat dans l’accueil à la maison comme à l’église pour les demandeurs de toutes sortes, de tous âges et de toutes conditions.
Rarement négatif ou critique, afin de donner leurs chances et d’ouvrir un chemin aux plus timides.
Ne s’imposant que rarement par le ton de sa voix habituellement faible ou discrète au point d’être inaudible.
Secret ou simplement discret comme pour laisser monter en lui une parole riche et profonde, cordiale et significative.
Le geste tout simple de poser la main sur votre tête ou votre épaule avec la question, alors comment ça va ?
Médusé, comme entièrement habité par Jésus dont il se voulait l’instrument quant il célébrait l’eucharistie.
Obstiné dans sa tâche de pasteur, comme ses ancêtres cultivateurs quelques soient les dispositions des personnes quelque fois bien lentes à bouger.
Penché sur les enfants qu’il accueillait comme sur les plantes de son jardin, passionné de leur croissance.
Rarement pressé dans sa démarche comme pour épouser le rythme de la nature.
En maison de retraite à Sens,
très attentionné tant qu’il le pouvait à son entourage, aux personnes âgées de la maison de retraite...
jusqu’à ce que lui-même, de plus en plus dépendant, soit l’objet de cette attention.
Toujours en lien avec sa famille et avec le Frère Paul Morel qui l’ont fidèlement accompagné dans sa longue maladie.
Ces souvenirs et bien d’autres ne peuvent-ils pas nous aider ? Tant de richesses ne peuvent pas disparaître mais doivent être transfigurées".

Propos recueillis lors des adieux.
Frère Pierre-Michel LABOREY
Chichery (Yonne)

 

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Né le 31 octobre 1929 à Asnières (Hauts-de-Seine), il entre chez les Frères Missionnaires des Campagnes le 10 mars 1951.
Il commence son Noviciat le 8 avril 1951, fait ses premiers vœux le 12 avril 1952 et ses vœux perpétuels le 16 avril 1955.
Après ses études de théologie au Grand Séminaire de Toulouse, au Prieuré St Martin à La Houssaye-en-Brie (S. et M.), chez les Oratoriens à Montsoult (Oise), à l’Institut Catholique de Paris, il est ordonné prêtre le 20 septembre 1959 à La Houssaye-en-Brie .
De 1959 à 1961, il est au Prieuré Ste Germaine de Pibrac (Haute-Garonne) ; il continue ses études et accompagne les Frères étudiants qui vont au Studium des Dominicains de Toulouse.
Ensuite, pendant 45 ans, il sera dans l’animation pastorale de plusieurs secteurs confiés aux Frères, dans différents départements :

  • dans l’Aisne, à partir du Prieuré d’Oulchy-le-Château (1961-1969)
  • dans l’Indre, à partir du Prieuré de Sainte Sévère (1969-1977) 
  • dans l’Oise, à partir du Prieuré de Crévecoeur-le-Grand (1977-1987) 
  • dans l’Eure, à partir du Prieuré de Canappeville (1987-1993) 
  • en Indre et Loire, à partir du Prieuré de Francueil (1993-2004) 

Malgré des problèmes de santé, il continue ses activités pastorales à Boulogne-sur-Gesse (Haute-Garonne) où il réside à partir de 2005. A la fin d’une célébration pénitentielle dans l’église de Boulogne, le mercredi saint 4 avril, il tombe subitement. Transporté d’urgence à l’hôpital de Toulouse-Purpan, il décèdera le lendemain Jeudi Saint, 5 avril 2007.
Une messe a été célébrée le mardi 10 avril à l’église de Boulogne-sur-Gesse.
Une autre messe a été célébrée le lendemain 11 avril à La Houssaye-en-Brie (Seine-et-Marne) avec les membres de sa famille, ses amis et des délégations de plusieurs Prieurés où il a vécu, puis il a été inhumé au cimetière de La Houssaye-en-Brie, dans le carré des Frères.
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Homélie du Frère Etienne Kauffeisen
pour le Fr. Philippe Laurent
La Houssaye-en-Brie
11 avril 2007
Si j’en juge par les coups de téléphone reçus, je vois que le Fr. Philippe n’a pas été oublié ; à Ste Sévère, à Crévecoeur-le-Grand, à Canappeville, à Francueil (Indre-et-Loire) où il est resté 9 ans ; et je remercie les amis de Francueil et d’ailleurs qui sont venus parmi nous en ce jour.
Pour moi, mes souvenirs seront surtout ceux de Francueil où le Fr. Philippe avait été nommé pour réorienter la pastorale de ce Prieuré et où je faisais partie de la communauté - communauté qui fut tellement marquée par le rappel à Dieu de tant de Frères ! Je crois pouvoir dire que le Fr. Philippe était heureux de vivre dans un Prieuré. Il était lui-même un élément de paix qui détestait les conflits. C’était un Frère simple, toujours régulier dans sa participation à la prière, plein d’attention pour les autres. Même si aucune communauté n’est parfaite, même si les singularités de l’un ou de l’autre l’étonnaient toujours. Il aimait prier, il aimait le chant, la liturgie ; il aimait prier la Ste Vierge : n’avait-il pas mis en route des équipes du Rosaire à Ste Sévère ?
Il remplissait sa tâche de pasteur avec conscience et minutie. Dans la pastorale des sacrements, rien n’était laissé au hasard et s’il faisait beaucoup de choses par lui-même, c’était pour être sûr que tout soit bien préparé. Accueillant et souriant, il recevait les fiancés avec délicatesse et gentillesse. Beaucoup gardent un bon souvenir de ces rencontres. Par timidité et aussi handicapé par sa santé, il avait - il est vrai- du mal à aller voir les familles.
Ce n’était pas l’homme des grands espaces et des projets incertains, mais c’était le Frère qui aimait ce monde rural qu’il avait choisi, ce monde où les relations sont plus humaines.
Amateur et fin connaisseur de la musique classique, sa musique intérieure était plus celle de Vivaldi et de Beethoven que de Wagner. Il était plus l’homme de l’harmonie des sons que des images. Pour le faire revivre plus proche de nous, j’ajouterai - chose surprenante - que c’était un lecteur assidu de romans policiers.
Le Fr. Philippe n’avait pas ce que l’on appelle une bonne santé ; peut-être ne s’en préoccupait-il pas assez, et je ne l’ai jamais entendu se plaindre. Mais courageux et volontaire, il assurait toujours son service de pasteur. Et je tiens à dire aussi combien l’affection de sa famille fut un soutien important, indispensable. Il revenait toujours reposé, réconforté de ses séjours en famille, comme aussi des sessions et de ce que l’on a appelé les « vacances-formation ».
Un jour ce fut la grande peine de quitter Francueil, même s’il n’a jamais laissé apparaître ses sentiments. Généreux et obéissant, il avait accepté de partir, il y a 2 ans, à Boulogne-sur-Gesse où il fut bien accueilli...
Et puis le Seigneur a appelé brusquement son serviteur fidèle : en ce Jeudi Saint, sa Pâque commençait. Le Fr. Philippe ne fut sûrement pas surpris de cet appel et je pense que la seule parole qu’il aurait pu dire était : « Seigneur, que ta volonté soit faite ! »

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1920-2008


Le Fr. René-Jean Marmou est né au pays des vignes... celles des coteaux de Blaye en Gironde... C’était en 1920, le 16 décembre à Braud et St Louis. Son père s’appelait Pierre, sa mère Marie. Il aimait à dire qu’il était du même âge que le pape Jean-Paul II ! Il fut baptisé le 9 Janvier 1921 dans l’église de son village. De son pays il avait gardé l’accent rocailleux, il roulait les ‘’r’’ !

A l’âge de 25 ans il entre au séminaire de vocations tardives de Gauriac dans son diocèse. Il y reste deux ans, puis il assure le secrétariat fédéral de l’action catholique rurale. C’est de là qu’il prend contact avec le Père Epagneul .
Il arrive à La Houssaye-en-Brie (Seine-et-Marne) en 1949. Il a 29 ans. Le 25 mars 1950 il prend l’habit FMC, et c’est 4 ans plus tard, le 25 Avril 1954, qu’il fait sa profession perpétuelle dans l’église de son baptême, à Braud et St Louis. Le Père Epagneul était venu là pour la circonstance.
Fr. René-Jean avec sa grande barbe, c’était une figure ! Ce fut aussi une exception ! Il aura passé toute sa vie dans le même Prieuré, celui de La Houssaye-en-Brie. Il est le seul FMC à ne pas avoir changé de Prieuré ! On se souvient que les premières années, il tenait le rôle d’infirmier au Prieuré et il faisait les piqûres dans le village. Matin et soir, à pied ou à vélo, pendant 60 ans, il aura assuré le service du courrier entre le Prieuré et le bureau de poste du village. Un autre service important qu’il a assumé presque aussi longtemps, c’est celui du secrétariat de la Chronique FMC-SC. Longtemps aussi il a participé à la vie paroissiale de Neufmoutiers, y secondant l’abbé Colmet Daâge.

Les abeilles !

Depuis le rucher du Prieuré qu’il a créé et n’a cessé de développer, il entre en contact avec d’autres apiculteurs du département.
En 1968, il devient « conservateur » (responsable) du rucher école du jardin du Luxembourg à Paris. Il se souvenait de Mai 68 !
En 1973 il commence a assurer les cours théoriques et pratiques du rucher école (115 inscrits en 1974). C’est dans ce cadre là, en reconnaissance de son travail et de ses compétences qu’il est décoré dans les salons du Sénat de la médaille du mérite agricole.(photo ci-dessous)
C’est Mr Poher, président du Sénat qui lui remettra sa décoration, entouré de nombreux collègues apiculteurs.
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Fr. René-Jean Marmou reçoit la Croix de Chevalier du Mérite agricole

« En 1968, vous êtes nommé Conservateur du rucher-école du Jardin du Luxembourg, où vous assurez seul et sans aucune défaillance depuis 23 ans, la totalité des cours pratiques. En 1985, Alain Bougrain-Dubourg vous a consacré un court-métrage et votre renommée a dépassé nos frontières puisque, très souvent, vous participez à des congrès, non seulement en Europe mais aussi au Japon et en Amérique du Sud. Votre barbe, votre chapeau colonial et votre blouse blanche sont bien connus et vous êtes, tous les ans, le personnage central sur le stand du rucher-école lors de l’Exposition d’Automne à l’Orangerie du Luxembourg. La Croix de Chevalier du Mérite Agricole vient justement consacrer votre œuvre... »
Extrait du panégyrique fait par Alain Poher, Président du Sénat, le mercredi 18 septembre 1991.
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Comme apiculteur il participe à divers congrès nationaux et internationaux. Au salon de l’agriculture à Paris, plusieurs années, il fera partie du jury pour décerner les médailles des meilleurs hydromels.
Beaucoup de monde passe au Prieuré St Martin ; tout le monde connaissait Fr. René-Jean, c’était ‘’le frère abeilles’’ ou ‘’le frère miel’’. Il avait le souci de vendre sa production ! 

[Allocution de Gilles Bodaert, de la Société Centrale d’Apiculture, aux obsèques du Frère René-Jean Marmou

 à La Houssaye-en-Brie]

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Un aspect moins connu peut-être ?

Il était aussi un militant de l’Espéranto, secrétaire national de l’espéranto catholique. Il a participé là aussi à de nombreux congrès nationaux ou internationaux. Peu bavard, il rêvait de pouvoir parler avec les hommes de tous les pays !
Dans les années 80-90, il a accompagné un groupe MCR (Mouvement Chrétien des Retraités) de la paroisse : lieu de partage de la vie et de la foi chrétienne. Volontiers, il participait aux voyages et aux repas du club des anciens du village.

Fr. René-Jean n’était pas un expansif. Il livrait peu de choses de sa foi, de son expérience spirituelle, mais jusqu’au bout, il aura été fidèle à la prière commune à la chapelle. Une fois ou l’autre il a quand même pu nous dire qu’une de ses jambes abîmée par un ulcère lui demandait plus d’une heure de soins le matin, avant de venir à la prière.
C’est vrai Fr. René-Jean ne se livrait guère, c’était son tempérament, mais pour moi, la manière dont il a vécu des passages difficiles de sa vie ont fait mon admiration.

Quand il a fallu quitter sa responsabilité au Jardin du Luxembourg ou d’autres services, laisser des lieux auxquels il tenait dans le Prieuré, quitter le Prieuré où il avait passé toute sa vie pour aller à la maison de retraite à Sens, il l’a fait ; parfois en ronchonnant un peu, mais quand c’était fait, on n’y revenait plus !
Quand il a fallu renoncer à marcher et ne plus se déplacer qu’en fauteuil roulant, devenir dépendant complètement, là encore il l’a fait tout en gardant une certaine paix, et sa capacité de sourire. Parfois il se fermait, mais c’est quand il souffrait.
Pas de grands discours, mais pour moi, l’esprit avec lequel il a vécu ces passages pouvait laisser transparaître quelque chose de sa vie intérieure et de sa ressemblance avec Jésus.
A sa manière !

Au revoir Fr. René-Jean ! Tu étais le doyen de notre famille religieuse. Avec tes dons et tes limites, ta part de péché, tu as essayé d’être un frère. Rejoins en Dieu, en Jésus vainqueur du mal et de la mort, tous ceux auprès desquels tu vas reposer au cimetière de La Houssaye ; ceux de ta famille aussi !

Fr. Claude Bocquillon
Prieur régional
à La Houssaye-en-Brie
le 28 avril 2008 jour de l’inhumation.

 

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Deux anectodes

 

Voici deux anecdotes qui complètent le souvenir que l’on a du frère René Jean.

La première est une agresssion dans le couloir du métro parisien. Il est 17 heures. Coup de téléphone au prieuré Saint Martin. "Le Frère René Jean a été agressé à sa descente de métro à la gare de L’Est, pouvez-vous venir le chercher au commissariat de police de la gare . amener un pantalon." J’y vais intrigué et légèrement angoissé. Est-il blessé ? Quand j’arrive, je vois le frère souriant et dixcutant avec des agents. Il est assis et sur ses genoux une serviette de toilette. Par force car il est en caleçon. Que s’était-il passé ? Un homme avait voulu lui prendre son porte feuille et l’avait bousculé si fort qu’il était tombé par terre et son pantalon était déchiré du haut en bas. Il s’était donc défendu.. Malin le frère n’avait pas perdu le nord, même à terre. Avec sa canne il avait attrapé le voleur par la patte et il s’était lui-même écroulé par terre lachant le portefeuillle. Puis il s’était enfui à toute jambe. Des passant félicitèrent le frère René et le conduisirent au commisariat de la gare ....en caleçon, le pantalon à la main. Ca ne l’a pas troublé et c’est dans cette tenue que je l’ai trouvé. Au retour nous avons bavardé de tout et de rien comme s’il ne s’était rien passé. Ca prouve une dose de courage et de conscience tranquille.

La seconde aventure est encore plus pitoresque : Un 11 novembre le frère René Jean est appelé par les pompiers de Paris pour venir chercher un essaim d’abeilles dans les jardins du Luxembourg car il était administrateur du rucher. Quand nous arrivons, il y a foule autour de la grande échelle de pompiers qui est déployée. Ca ne trouble pas le frère. Il s’équipe et grimpe les échelons de l’échelle lentement juqu’à ce qu’il disparaisse dans les feuillages ’un maronnier. Quelques minutes plus tard nous le voyons réapparaître une main sur la rmabarde de l’échelle et l’autre tenant une assez grosse caisse en bois autour de laquelle virevoltent une nuée d’abeilles. La foule s’émeut. Lui descend tranquillement, mais l’échelle étant en trois parties à chaque intercessions, il s’érrête et son pied cherche le rayon suivant. Il hésite et la foule fait : OH ! A la deuxième intercession, son pied cherche plus longuement et semble même le rater. La foule hurle un OH ! retentissant. Mais tout rentre dans l’ordre et enfin tout va bien et il met pied à terre au milieu des applaudissements. Quand nous renons en 2 CV, je lui dis : " C’est tout de même très dangereux ce genre de sport." Il me répond avec un sourire : "J’ai l’habitude et il faut bien faire un peu de cinéma. " C’est un frère qui m’a toujours impressionné et que j’ai beaucoup admiré, donc aimé.

Frère Guy Ollivon

 



 

 

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Le Fr Yves-Henri Denis de Bonnaventure est né le 24 avril 1932 à Aytré, à 5 Kms de La Rochelle (Charente-Maritime). Il gardera toute sa vie le goût des grands espaces et des larges horizons... Au cours de ses études classiques au Collège de Paimpol, il sent monter en lui le désir de l’aventure maritime. Deux ans de navigation le préparent à faire son service militaire dans la marine nationale, à l’époque de la guerre d’Algérie.
Le retour à la vie civile s’accompagne du désir de se mettre au service des autres, et comme il l’exprime lui-même dans la « radioscopie » parue dans Chronique de juin 2008 : « Je ne voulais pas être prêtre. En entendant parler des Frères Missionnaires des Campagnes, j’ai pensé pouvoir vivre en milieu rural, en laïc religieux dans le monde ».

Entré dans la Congrégation des Frères Missionnaires des Campagnes le 11 novembre 1959, il fait sa profession perpétuelle le 5 septembre 1965 à Beaumont en Véron (Indre et Loire). Les paroles bibliques qu’il a choisies pour l’image-souvenir de son engagement sont révélatrices de sa sensibilité spirituelle : « Vers les eaux du repos Il me mène pour y refaire mon âme » et « Par la mer passait son chemin, son sentier par les eaux profondes... »
Après les années de formation à la spiritualité biblique, liturgique et missionnaire de la Congrégation et des stages de travail dans le Vaucluse, l’Eure, la Seine-et-Marne, il fait un premier séjour à Boulogne-sur-Gesse (Haute-Garonne) où il travaille comme maçon dans les villages alentour.
Dans la radioscopie déjà mentionnée, il parle des années de travaux saisonniers, où, avec Fr. Charles-François Mansuy, ils suivaient les gens du voyage en caravane.

Puis il vécut 18 ans à Ille-sur-têt (Pyrénées-Orientales) au Prieuré, avec un travail salarié dans le maraîchage et l’arboriculture, jusqu’à sa retraite professionnelle ; puis 5 ans en Ariège, au Prieuré du Fossat.

Enfin, en 1998, c’est son retour au Prieuré de Boulogne sur Gesse où il est resté jusqu’à son décès subit le 31 octobre 2008.
A Boulogne sur Gesse, il continue à lire beaucoup et à se tenir au courant des événements du monde. Peu désireux qu’on parle de lui et évitant toutes les situations qui lui auraient donné l’impression d’être mis en avant, Fr Yves-Henri se sentait très à l’aise parmi les gens simples, ceux qui se reconnaissent « petits » et qui disent sans détour ce qu’ils pensent.
Il cachait sous un humour parfois grinçant mais qui visait juste, sa culture littéraire, la richesse de son expérience humaine et sa vive sensibilité aux marques d’amitié et d’affection.
Durant les années passées avec lui, j’ai toujours sollicité et apprécié son bon sens et la sûreté de son jugement spirituel quand j’hésitais devant des décisions à prendre, concernant la pastorale du Secteur ou la confiance à accorder à une personne ou à un groupe.
Quand il sentait le témoignage évangélique en cause, il ne se dérobait jamais. Certes, comme tout être humain, il avait aussi ses faiblesses ; mais la force de la vie religieuse c’est d’être solidaires, dans un chemin d’humilité qui va, selon l’expression si juste du Père Rondet, jésuite, « de la sainteté désirée à la pauvreté offerte ».

Lors de la célébration de son passage « de ce monde au Père », un de ses neveux et filleul faisait l’unanimité de ceux qui l’entouraient dans l’église de La Houssaye-en-Brie (S.et M.) le 4 novembre avec ces mots concernant celui qu’ils appelaient "Oncle Yvon" : « Il était fier et content de nous montrer la terre où il travaillait ou la montagne qui l’entourait. Il était fier et content de nous présenter ses compagnons de travail et tous les gens simples qu’il côtoyait tous les jours : paysans, ouvriers, gens du voyage... Il ne nous racontait pas l’Évangile, il nous racontait ce qu’il vivait et c’était l’Évangile ».

Des objets symboliques ont été alors déposés sur son cercueil :
- La casquette de marin : qui évoque sa soif des grands espaces et les ports où il avait fait escale en Afrique, au Moyen-Orient, en Asie... mais aussi la passion de l’au-delà des mers qui l’a toujours habité.
- le sécateur : qui évoque sa vie de salarié de l’agriculture. Des années durant, il a taillé vignes et arbres fruitiers...
- la caravane : malgré son attachement à sa culture et à sa famille naturelle, il a su s’ouvrir à la famille des gens du voyage dont il a aussi partagé la vie et le travail.

Frère Jacques Dentin