En février 1978, Frère Joseph MOULAY, membre du Prieuré du Neubourg (Eure) devait arrêter tout travail pour être hospitalisé à Rouen. Malgré la recherche assidue des médecins et l'attention constante du personnel hospitalier, il achevait, le 13 septembre 1978, sa route sur cette terre, ouvert à l'amour éternel de Dieu. Il était âgé de 34 ans.


1943-1978 Joseph MOULAY bJusqu'au bout, il est resté dans la paix, accueillant chacun, fortifié par la foi et la prière.
De nombreux amis ont participé à ses obsèques le 16 septembre, au Neubourg (Eure) et à Champéon (Mayenne).

 

« Je vous exhorte
par la tendresse de Dieu
à Lui offrir votre personne
et votre vie
en sacrifice saint.
Cherchez à comprendre
les événements dans leur profondeur
pour savoir quelle est
la volonté de Dieu. »


(Saint Paul aux Romains)

 

Frère René-Joseph CHARRIER est décédé le 11 janvier 1981, à l'hôpital de Coulommiers, après une longue maladie de deux ans. Il était chez les F.M.C. depuis 1951. Il fit son noviciat à La Houssaye-en-Brie (Seine-et-Marne). Il vécut dans les Communautés de Saints (Seine-et-Marne) et de Saint-Sulpice (Oise).

 

Les Frères du Prieuré Saint-Martin à La Houssaye, sa dernière Communauté, expriment ici comment ils ont vécu, en union étroite avec le Frère, ces moments délicats de la maladie et de la mort.

 

Au cours d'une veillée, précédant la sépulture, Frères, parents et amis ont fait revivre pour quelques instants très denses, le visage du Frère.

LES DERNIERS MOIS

Hospitalisé en 1979, Frère René-Joseph a reçu un traitement chimio-thérapique qui devait stopper l'évolution d'un cancer des ganglions. Au printemps 80, il a pu reprendre son travail à mi-temps, à l'entretien dans une école de Meaux où il logeait sur semaine. En août, le cancer récidive ; il doit écourter son séjour en famille et est de nouveau hospitalisé pour examens. Dès octobre, les médecins laissent entendre qu'ils ne maîtrisent plus l'évolution du mal ; seule chose possible : soulager les souffrances.

Nous prenons conscience alors, en communauté, de l'importance de l'événement qu'il nous est demandé de vivre. Progressivement, nous décidons de l'entourer de façon plus étroite : il aura une visite pratiquement chaque jour. Beaucoup de Frères, de Sœurs, d'amis, sa famille aussi, ont bien vite assuré avec nous près de lui, une présence régulière soit par des visites, soit par lettres.

Dimanche 11 janvier 1981, à 0 h 15, Frère François recevait son dernier souffle, au moment où Frère Roger venait prendre le relais de veille pour la nuit.

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Frère René, tu faisais partie de notre famille. On t'aimait bien. Tu étais toujours là pour nous rendre service. Tu aimais tant nos enfants ! Tu nous comprenais et on aimait bien parler avec toi. On n'en finirait pas de dire de bonnes choses de toi, des bons moments qu'on a passé ensemble. Et même, quand des gens nous voulaient des ennuis, tu n'hésitais pas à nous défendre, allant jusqu'à te compromettre. Tu aimais aussi à nous parler de Dieu, à nous expliquer la Bible, à nous aider à prier et à mieux nous aimer les uns les autres. Ta longue maladie nous a beaucoup peinés, mais toi tu avais toujours le courage. Dernièrement, quand nous t'avons souhaité la Bonne Année, tu nous as répondu : « C'est surtout à vous : que vous ayez la santé et du Bonheur et que Dieu et la Sainte Vierge soient toujours avec vous ». Nous ne te verrons plus, mais ton souvenir restera toujours avec nous. Comme tu nous l'as montré, nous nous tournons vers Dieu pour le remercier et nous le prions de tout notre cœur pour que tu sois heureux avec lui.

 Les gens du voyage.


 

 

Il aimait le jeu... les enfants... il aimait la fête... les voyages... c'était le boute-en-train de la famille. Il n'a jamais voulu inquiéter sa famille sur sa maladie. Il était attentif à chacun des siens pour les rejoindre dans leur vie quotidienne.

 Sa famille.


 

 

 

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UNE QUESTION DIFFICILE : PARLER ?

Plusieurs fois, des Frères nous ont demandé si nous parlions avec lui de la mort. Cette question est sans doute posée trop souvent dans l'abstrait, «autour d'un tapis vert»... mais "un dessus-de-lit n'est pas un tapis vert" disait l'un de nous.

Une maladie comme le cancer - Frère René-Joseph connaissait la nature de son mal - peut avoir des évolutions inattendues. Le Frère n'attendait pas la mort, mais s'accrochait au moindre petit détail pour croire en la guérison ; jusqu'au bout il a fait des projets, au risque de se donner des illusions : par exemple, quand les corticoïdes le faisaient grossir ou excitaient sa faim, il y trouvait un signe de mieux. Il faisait grande confiance aux médecins qui l'avaient tiré d'affaire plusieurs fois. Nous n'avons jamais entretenu ces illusions, dans un faux jeu ; ce qui nous paraissait le plus important, c'est que le Frère soit devenu capable de remettre en cause lui-même les projets qu'il faisait, dans une grande disponibilité. N'est-ce pas cette attitude de fond qui est essentielle ? Avec d'autres malades, il est peut-être possible de vivre un autre cheminement

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... Frère René s'intéressait beaucoup aux autres malades de l'hôpital et très souvent, il me demandait des nouvelles de tel malade dont je lui avais parlé et pour qui je lui avais demandé de prier. Frère René dans sa maladie était demeuré avant tout un Frère missionnaire : il avait gardé le souci de la mission. Il me posait des questions sur ce qui se fait, ce que les confrères faisaient dans les différents secteurs d'apostolat. Très souvent il m'a parlé de ses amis les gitans, les gens du voyage ; il était toujours très touché quand ceux-ci venaient le visiter. Ce que je souhaite aujourd'hui, c'est que Frère René continue à partager avec nous nos soucis, nos projets, nos essais au service de la mission dans ce secteur, et aussi à l'hôpital de Coulommiers...

P. Marcel HUCHON Aumônier de l'hôpital de Coulommiers.

 

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UNE AVENTURE SPIRITUELLE

1928-1981 Rene-Joseph CHARRIERLe temps fort de cette « remise entre les mains de Dieu », a été l'onction des malades. « J'y pensais, a-t-il dit, depuis mon pépin de santé de 68 ». L'un de nous lui en avait parlé en septembre. C'est lui-même qui a fait ensuite la démarche, à l'occasion de la célébration que préparait le secteur de Rozay –en-Brie pour une vingtaine de malades.

Jusqu'aux derniers jours de sa vie, Frère René-Joseph a trouvé appui dans ce sacrement : il en parlait souvent aux uns et aux autres. Plusieurs fois, on a pu lui demander : « Comment vis-tu ce temps de maladie ? ». Un jour, il a répondu : « Quand on est malade, on est dépendant pour tout ; c'est plus facile de se sentir dépendant de Dieu ».

Les uns et les autres, Frères, Sœurs, aumôniers de l'hôpital, nous avons pu prier très facilement avec lui. Il aimait exprimer sa foi et surtout ouvrir la prière sur les malades de l'hôpital, le personnel, les événements du monde. Plusieurs fois, nous avons pu célébrer la messe ou l'office avec lui, ou plus simplement le chapelet. Il aimait en particulier, que l'on dise un psaume et lui, écoutait... ce n'était pas sans émotion, car ces « cris d'hommes » que sont les psaumes sont une rude école pour prier face à la maladie, à la souffrance, à la mort.

 Aller lui rendre visite devenait une aventure spirituelle : il fallait s'y préparer par un temps de prière personnelle, pour se mettre dans un climat de rencontre profonde. Parfois, nous avons eu conscience de le fatiguer, surtout dans les derniers moments où il était pris dans l'étau d'une souffrance sourde. Alors, nous restions, près de lui, en silence.

 

 C'EST LUI, LE PAUVRE QUI ETAIT RICHE

« Plusieurs fois, disait l'un de nous, il m'a amené avec lui chez les gens du voyage. Il arrivait en pauvre chez eux. C'est eux qui le soutenaient. Et c'est lui le pauvre qui était riche ». Les limites personnelles ne sont-elles pas souvent chances pour le Royaume ? C'est ce que nous pensions en voyant les amis du voyage lui rendre visite à l'hôpital ou venir prendre de ses nouvelles. Et nous avons été bien plus heureux encore quand ils sont arrivés de Montargis par un temps épouvantable, pour être avec nous à l'enterrement, et quand ils ont accepté de partager le repas qui suivit. C'était un des derniers projets du Frère René-Joseph : « Quand je reviendrai à La Houssaye-en-Brie, nous les inviterons tous pour un grand repas »...

Aujourd'hui, nous avons devant nous, à la chapelle, la belle croix où sont gravés son nom et les dates de ses deux années de « naissance » 1928-1981. Et nous aimons reprendre le chant : « Tu es le pauvre... en toi, la vie éternelle de Dieu. »

Face à la mort, les mots se font plus lourds de sens.

 

Les Frères du Prieuré Saint-Martin

 (Extrait de CHRONIQUE des FMC et SC N° 135 Juin 1981)

Lundi 12 novembre, juste après sa fête et la veille de son anniversaire, en l'église de Quatremare, rassemblés autour de notre évêque, du Père Epagneul, fondateur des Frères Missionnaires des Campagnes, et du Frère Jean-Louis, prieur général, les Frères, les Sœurs et sa famille, moniteurs, personnel du Centre, stagiaires, anciens moniteurs, anciens stagiaires et beaucoup d'amis, nous avons célébré la messe d'enterrement du Frère Léon.
Entrecoupés de chants pleins d'espérance et de moments d'un silence très priant, des témoignages ont été donnés sur notre Frère.
Frère Léon a quitté son exploitation agricole des Libaudières, en Vendée, à 35 ans pour entrer chez les Frères selon l'appel du Seigneur. Après quelques années de formation, il a été neuf ans au Prieuré de Pibrac, près de Toulouse, et est venu à Canappeville en 1972, où il travaillait comme chauffeur de tracteur.

Frere Leon BONNAUDET 1923-1984 Bien qu'il n'ait pas été moniteur, il connaissait tous les stagiaires depuis 12 ans, les appelait par leur prénom et pour la plupart, savait ce qu'ils étaient devenus. Il était membre de l'A.S.A.V.P.A. qu'il appréciait beaucoup.

Avec Frère Léon, la vie n'était pas triste. Combien n'ont-ils pas fait avec lui une partie de tarot où il avait de la chance plus qu'à son tour. On se demandait parfois s'il ne reconnaissait pas les cartes rien qu'à voir leur dos ! En tout cas, il était très observateur, et à 50 mètres, distinguait un lièvre d'une hase... Il aurait voulu qu'on soit tous gais comme des pinsons.

Très coloré et souvent blagueur dans ses paroles, il était très simple dans la réalité de sa vie de religieux fidèle, plus préoccupé par l'heure de sonner la cloche, par le traitement des blés ou la cuisine du dimanche midi qu'il assurait souvent, que par les grandes idées - ce qui ne l'empêchait pas d'avoir des connaissances précises de géographie et de s'intéresser à tous les peuples du monde, sur le plan humain et missionnaire.

Alphonse Spriet, son compagnon de travail nous dit de lui : « Frère Léon était bon, foncièrement bon. Jamais on ne l'entendait formuler une critique désobligeante. Il excusait toujours. Il avait sur les lèvres le mot aimable qui fait plaisir. Empressé de rendre service, il le faisait avec tact et modestie ».
Il avait un cœur gros comme ça. Il l'a lâché en pleine nuit. C'est la mort qu'il souhaitait.
Merci, Frère Léon !


Les Frères du Prieuré Notre-Dame-des-Bois
Canappeville (Eure)

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Témoignage d'un foyer ouvrier de Brax
Adieu Léon, Frère et ami...

« Nous ne savons pas l'heure... »
Ce dimanche, à la fin de la messe : une annonce... Ton retour à Dieu.
Un regard avec Jeannot : « C'est notre bon Léon qui nous a quittés, non ! Ce n'est pas vrai... nous ne voulons pas...
Tu es parti si vite, en silence, comme si tu nous faisais une farce, car tu aimais en faire, te souviens-tu ? Vous souvenez-vous Frères de Pibrac ?
Nous revoyons ton visage souriant, toujours heureux. Quand nous sommes-nous connus? Nous ne savons plus... qu'importe. Où ? à Pibrac bien sûr... tout simplement, l'amitié était là, simple et belle ; c'est comme ça chez nos Frères et Sœurs des Campagnes.
Nous nous souvenons de ton accueil chaleureux ; nous nous arrêtions au Prieuré parfois, souvent pour rien... nous étions chez nous ! Pour dire bonjour à toi, à tous, à chacun ! Jouer à la belotte, à la pétanque, partager le repas. Tu venais aussi chez nous.

Homme de la terre, tu aimais la terre, tu aimais ton verger, ta vigne gorgée de vie, les belles fleurs ; on revoit ta fierté dans le chais qui sentait le vin nouveau...
Un jour, l'Office manqué, car nous bavardions dans l'entrée, tu nous as dit « c'est important aussi, le temps qu'on passe avec ses amis ». Tes amis sont nombreux, et tu les as aimés. Tu étais souriant, cordial, aimant rendre service. Brave homme !

Mais sais-tu que c'était « LUI » que nous imaginions dans ton accueil, car la prière à la chapelle, aussi, nous l'avons partagée.
Ton départ de Canappeville... regret de nous quitter, tu n'aimais pas déménager...

Un jour - un an après - à la Profession d'un Frère à Lavannes : « mes amis... mes amis, c'est vrai » la larme à l'œil, c'était bien toi ; quelle joie ! Ce que nous avons pu bavarder !

Ensuite à Canappeville, quelle était belle la Normandie ! Merci à toi, à nos Frères de ce voyage.
Ton souvenir restera parmi tes amis, nos prières sont pour toi. Mais toi, qui vois le Père, demande-lui que tous les hommes retrouvent le sourire ; car le sourire c'est le bonheur...

Adieu, Léon !

Reine et Jeannot, Brax (H.-G.)

 

 

 

 

 

1925-1985 Jean-Paul Cornet RoseFrère Jean-Paul Cornet
nous quittait le 19 mai 1985

au terme d'une longue maladie. Il avait 60 ans (1925-1985).

 

Voici le témoignage d'un de ses amis, engagé comme lui au service des ouvriers agricoles.

Nous sommes venus aujourd'hui te dire : « A Dieu ».
Mais avant, nous voudrions te dire que ta vie a été pour nous, salariés de l'agriculture, un exemple de courage, de force et de vérité devant les événements de la vie.
Tu as su nous montrer le chemin à suivre, non seulement par des paroles, mais aussi par des actes, pour aider les plus démunis d'entre nous.
Malgré ta maladie, tu as lutté de toutes forces jusqu'au bout pour faire avancer le progrès social. Tu as su passer tes responsabilités en temps voulu pour nous apporter tes derniers conseils.
Tous ces messages, nous les garderons bien précieusement sans les oublier, et nous les utiliserons le moment voulu.
Nous t'en remercions et te disons tous : « A Dieu, Jean-Paul ! »

Albert Lebrun

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Témoignage du Prieur Général

«Jean-Paul avait la conviction que lorsqu'un homme donne le meilleur de lui-même dans le travail, les relations aux autres, la lutte contre la maladie ou toute forme de souffrance, l'Esprit de Jésus est là, à l'œuvre...
Jean-Paul CornetAux bons, comme aux mauvais jours, la Parole de Dieu écoutée et priée a été sa Lumière. Lorsque les hommes refusent la fatalité, la pauvreté, l'égoïsme, qu'ils relèvent la tête et s'organisent, ils rencontrent un certain combat sur leur route, ils sont la sève de roses qui fleurissent et s'ouvriront demain.

Jean-Paul a vécu longtemps avec les fleurs, mais surtout pour l'homme : celles qui fleurissent sur la terre de la fraternité annoncent celles que Dieu veut faire fleurir pour toute l'humanité rassemblée dans son amour, en laquelle notre frère a espéré»

Frère Jean-Louis Lejay