1986 03 Alphonse Distinguin snapFrère Alphonse DISTINGUIN
vient de nous quitter le 2 mars 1986.

Il a connu les Frères de La Houssaye directement, car il travaillait à Rebais en Seine-et-Marne. Ses copains avaient remarqué sa piété ; ils lui avaient dit : « Pourquoi ne vas-tu pas vivre avec Alfred et les autres à La Houssaye ? » Il rejoint la communauté et s'engage comme religieux à 25 ans.
Son handicap ne lui permet pas les gros travaux. Il soigne les poules, cultive les fleurs. Il prend sa part de travaux ménagers (cuisine, lessive, balayage) dans les prieurés de La Croix, La Houssaye, Charny et Luzillé.

Il a terminé sa vie dans une maison de repos près du prieuré de Lorris (Loiret).
«Qui pourra nous séparer de l'amour du Christ ? La détresse ? L'angoisse ?
Le danger ? Non, car en tout cela, nous sommes les grands vainqueurs, grâce à
Celui qui nous a aimés.» (Romains, 8, 35 et 37)

(Extrait de CHRONIQUE des FMC et SC - N° 155 - Juin 1986)

1986 06 Bernard-Jean Domin snap
Né dans le Calvados, il se sentait proche de sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus.
Il a cherché à se faire petit comme un enfant pour entrer dans le royaume de Dieu.
Déjà prêtre, il devient Frère Missionnaire des Campagnes dans une Congrégation qui en était à ses débuts.
Il exerce divers ministères, entre autres il prêche des missions en Seine-et-Marne. Il consacre du temps à composer des chants comme celui-ci :

«Je suis la résurrection et la vie
qui croit en moi fût-il mort vivra
celui qui vit et qui croit en moi
ne connaîtra pas la mort éternelle».

De la Houssaye-en-Brie (Seine-et-Marne) il passe à la communauté de Charny (Yonne). Il devient aumônier départemental de la «Fraternité Catholique des Malades et Handicapés».
«Il aidait les personnes à se mettre en route. Il savait leur donner confiance en elles-mêmes et il savait les soutenir».

C'est en 1978 qu'il fit une expérience spirituelle très forte. Il fut bouleversé par l'Esprit de Jésus. Il voyait avec le cœur, source de relations fraternelles nouvelles.


Le poème des pages suivantes a été écrit par Frère Bernard- Jean Domin le 18 mars 1986 alors qu'il devait nous quitter le 10 juin 1986.

Au bout de toutes les routes
la maison
Au bout de toutes les ascensions
le refuge
Au bout de tous les déserts
l'oasis
Au bout de toutes les tempêtes
le port
Au bout de tous les tunnels
la lumière
Au bout de toutes les nuits
l'aurore
Au bout de tous les hivers
le printemps

Au bout de toutes les guerres
la paix
Au bout de toutes les défaites
la victoire
Au bout de toutes les larmes
le sourire
Au bout de toutes les haines
l'amour

Au bout de toutes les maladies
la guérison
Au bout de tous les péchés
le pardon
Au bout de toutes les séparations
les retrouvailles

Au bout de tous les dangers
la sécurité
Au bout de tous les doutes
la certitude
Au bout de toutes les tristesses
la joie
Au bout de toutes les détresses
la consolation
Au bout de tous les désespoirs
l'espérance
Au bout de toutes les faims
la nourriture
Au bout de toutes les soifs
l'eau vive
Au bout de toutes les croix
la résurrection
Au bout de toutes les morts
la vie

Au bout de tous les abandons
MARIE
Au bout de toutes les faiblesses
l'ESPRIT
Au bout de tous les chemins rudes
JÉSUS
Au bout de tous les désirs
LE PÈRE


(Extraits de CHRONIQUE des FMC et SC – N° 156 – Septembre 1986)

1989 04 Rene Sourice snap 

«Tonton René, ce matin, en regardant frissonner les fleurs du jardin au soleil levant, j'ai pensé à toi, parti vers l'au-delà... Tu venais de partir au Brésil, avec et pour tes frères, et d'un seul coup, tout bascule... Il faut nous séparer mais ce n'est pas nous quitter... Que ton départ soit à l'image d'une montagne que nous allons gravir ensemble : toi, par la face opposée, invisible, dans la lumière; nous de ce côté-ci, mais les uns et les autres guidés par la grâce et communiquant par la prière…»

Cet adieu émouvant, écrit par Laurence, une des nièces de Frère René, a été lu à la fin de la célébration, le samedi 22 avril 1989 après-midi, dans l'église de La Houssaye. Là, autour du cercueil couvert d'un simple bouquet de fleurs du Brésil, s'étaient rejoints une quarantaine de membres de sa famille, des Frères, des Sœurs et quelques amis pour partager une même prière dans la gravité mais aussi dans une commune et fraternelle espérance.

C'est le mardi précédent, à 14 heures (9 heures au Brésil), que l'annonce nous parvenait, bouleversante et irréelle, de la mort subite de Frère René Sourice, terrassé dans le courant de la nuit par une crise cardiaque foudroyante. La veille au soir, avec Frère Maurice Cœur et Frère Jean-Marie Fouquet, René avait fêté ses 56 ans chez les Frères Maristes qui les hébergent à Brasilia.

Né le 17 avril 1933 dans une famille de 7 enfants, au Voide (Maine-et-Loire), il était entré chez les F.M.C. en mars i960 pour commencer son noviciat. Après sa Profession perpétuelle le 19 avril 1965, René est ordonné prêtre le 27 mars 1966 et il passe dix années à Pibrac. Il est ensuite envoyé au Portugal où il va rester onze ans. Puis c'est la longue préparation et l'attente du départ pour le Brésil où le Chapitre de 1985 avait projeté l'envoi d'une communauté.

La nuit du 22 février 1989, dans l'avion qui les menait enfin vers Rio de Janeiro, Frère René écrivait : «Ce n'est plus un rêve... nous tournons le dos à un monde familier pour en trouver un autre qu'il nous faudra découvrir. Nous ressentons que nous sommes en train de vivre un moment important pour la Congrégation. Nous nous sentons comme portés par elle dans cet envoi et nous mesurons toute l'importance de notre mission auprès des ruraux du Nordeste».

Le choc de cette mort nous bouleverse. Pourquoi mourir avant de commencer une mission si importante ? «La mission est commencée» disaient Maurice et Jean-Marie au téléphone. Et, à La Houssaye, tout au long de la célébration, cette phrase de l'Évangile revenait comme un refrain : «Si le grain de blé ne tombe en terre et ne meurt, il reste seul ; s'il meurt, il porte beaucoup de fruit» (Jean, 12, 24).

Oui, René, déjà tu veilles autrement aux premiers pas de notre communauté latino-américaine.

(Extrait de CHRONIQUE des FMC et SC - N° 167 - Juin 1989)


 

1989 07 Julien Bruand snap
La précédente Chronique a rendu compte de l'A-Dieu au Frère René Sourice. Aujourd'hui elle évoque le Frère Julien Bruand. En moins de trois mois la Congrégation vit l'épreuve de deux morts subites qui touchent particulièrement le Prieuré de Lagameças. C'est une taille douloureuse pour nous et pour la mission.

Né le 7 décembre 1940 dans une famille rurale à Athée (Mayenne), Frère Julien est entré chez les FMC en 1965 après avoir passé quatre ans au grand séminaire de Laval. Après sa Profession perpétuelle en 1970, il vit dix ans dans le diocèse de Soissons, aux Prieurés de La Croix et de Charly, où il travaille en usine, participe à l'alphabétisation des émigrés portugais, à la vie syndicale et à des organisations qui agissent dans le sens de la non-violence.

Il est ensuite envoyé au Portugal. Il s'était porté volontaire dès la fondation du Prieuré de Lagameças. Il garde un travail d'ouvrier, poursuit des engagements avec des organismes qui militent pour la paix et l'information sur les minorités et les peuples opprimés (Pax Christi). Il prend part à l'animation de groupes bibliques et à la préparation d'adultes au baptême. Il est accompagnateur du MAC (action catholique des enfants).
Ce sont des enfants, réunis avec lui pour la préparation d'un camp, qui donneront l'alerte au moment de son hémorragie cérébrale foudroyante. Il est mort le vendredi 7 juillet à l'hôpital de Lisbonne.

C'est vraiment le peuple de Dieu dans toute sa diversité qui s'est rassemblé dans une même communion dans l'église de Poçeirâo le mardi suivant pour exprimer à Dieu sa souffrance, son action de grâce et son espérance, ainsi que pour témoigner sa sympathie aux Frères Eugène, Pierre-Marc et Michel, et aux membres de sa famille, sa maman, son frère, ses deux sœurs et sa filleule.
Chacun a ressenti combien les Frères et les Sœurs sont du pays : « il faisait vraiment partie de nous ». Pauvres et riches, voisins et amis, religieux(ses) d'une dizaine de Congrégations, militants d'action catholique, de Pax Christi, paroissiens des divers villages environnants et de la zone, prêtres ouvriers, représentants de l'évêché, chrétiens de longue date et en cheminement, adultes récemment baptisés ou confirmés... le peuple de Dieu célèbre l'eucharistie. Il s'exprime avec des chants, des symboles, des paroles qui évoquent la paix, la justice, les peuples en quête de pain et de liberté, l'engagement du chrétien avec ses conséquences sociales, les vocations nécessaires pour la terre de l'Alentejo et tous les ruraux.

Les enfants resteront au plus près du cercueil. Les jeunes femmes baptisées dans la nuit de Pâques, que Frère Julien avait accompagnées dans leur cheminement, voudront porter elles-mêmes le cercueil.

Alors qu'il est entré dans une communion sans frontières, dans une vie sans limites, à la suite du Christ, son corps repose au cimetière de Poçeirâo, dans cette terre portugaise où il a voulu être témoin de la vie et de l'amour de Dieu pour chacun : «Ce que tu as fait à l'un de ces petits qui sont mes frères, c'est à moi que tu l'as fait». Devenu l'un d'entre eux, nous avons fait l'expérience que dans la maladie et la mort il ne nous appartenait plus.

Une célébration dans l'église de son village natal a réuni sa famille, ses amis de Mayenne, Frères et Sœurs, le 17 juillet.

«Qui sera notre accompagnateur ?» disent les jeunes du MAC. «Il faut regarder en avant, comme vous dites en français, avec courage», nous dit un prêtre portugais.

Que les vies données de nos deux Frères, René et Julien, soient semence pour la mission en rural, afin de pouvoir poursuivre jusqu'au bout l'œuvre commencée, comme nous y appelle une des dernières notes de Julien posées sur son bureau : «Le chemin qui descend à la source... C'est un chemin long et complexe et, de plus, rendu constamment précaire soit par la fragilité intrinsèque des desseins et des réalisations humaines, soit par les mutations des conditions externes extrêmement imprévisibles. Il faut cependant avoir le courage de se mettre en route et, lorsqu'on a fait quelques pas ou parcouru une partie du trajet, aller jusqu'au bout».


Extrait de CHRONIQUE des FMC et SC – N° 168 – Septembre 1969