Lectures : Rom 5,1-5 et Luc 12, 35-38 et 40

Nous avons coutume de dire, nous frères et sœurs des campagnes que notre spiritualité s’alimente de la parole de Dieu et de la vie des hommes. Louis était bien l’un de nous, animé par la foi et l’espérance dont nous parle l’auteur de l’épitre aux romains. Son espérance et sa foi se vivaient avec calme et patience et avec la simplicité du paysan qu’il était. C’était un « sage » un « roc » dit une amie. Oui il était solide dans ses convictions comme un « roc » et même parfois un peu « têtu » ; et pourtant il ne cherchait jamais la dispute ; s’il n’était pas d’accord il disait simplement : « oui faut voir » ! Ces derniers temps, si on lui communiquait le bonjour d’un ami rencontré il disait toujours : « merci, tu lui diras merci » A notre tour, Louis, nous te disons :
Pour ce que tu étais, merci et gloire à Dieu

Restez en tenue de service, votre ceinture serrée autour des reins ! Louis était un marcheur pour aller dans la nature ou dans le village rencontrer des gens. Il a gardé jusqu’à la fin la ceinture de cuir que nous avions autrefois au-dessus de notre tunique de Frères des campagnes. On se souvient aussi de son bonnet, de ses brodequins et de son bâton de pèlerin qu’il ne voulait jamais lâcher même en partant à l’hôpital. Il aimait aller dans des associations, jouer aux cartes, aux boules et avec d’autres s’engager pour des causes justes : Collectif citoyen et Cercles du silence.
Pour ta solidarité, Louis, merci et gloire à Dieu

Heureux ces serviteurs-là que le maître, à son arrivée, trouvera en train de veiller. Louis veillait avec « une grande curiosité » en accord avec la parole du Père Epagneul « mes frères soyez sagement curieux de tout » Il restait des heures à regarder par la fenêtre le paysage, les gens qui passaient : tout l’intéressait. En Afrique son nom était « Kiitou » : celui qui regarde avant d’agir et à qui rien n’échappe !
Pour ton regard de guetteur, Louis, merci et gloire à Dieu

A son départ d’Atchangbadè au Togo, après 9 ans de présence dans le village, les paysans ont voulu faire la fête : en réponse aux discours et applaudissements qu’il recevait, il dit aux gens : « ces applaudissements ne sont pas pour moi seul mais pour tous les frères ; vous avez bien compris que nous avions voulu ensemble travailler avec vous : vous avez accepté de vous unir pour avancer ; si un homme a une idée et en rencontre un autre qui a la même idée puis 2, 3, 4: c’est que l’idée est bonne. Et vous vous êtes mis en route !
Pour ton humilité, Louis, merci et gloire à Dieu

Quelques jours après, tu disais au Frère Remi : « Une amitié se manifestait. C’était une amitié partagée, une présence. Les paroles de louange à mon départ, s’adressaient à moi et à tous les frères. Nous ne sommes pas des individus, mais une communauté. Nous sommes réunis pour vivre ensemble dans des villages et pour travailler avec les paysans. Ils ont vu qu’on était venu pour aider tout le monde : ils nous ont vu travailler avec la houe, la pioche, les bœufs. Notre présence est un témoignage d’évangile, un témoignage de vie et de vie communautaire. Annoncer l’Evangile, c’est une proposition et c’est Dieu qui se fait reconnaitre. Vouloir annoncer l’Evangile dans un village sans partager la vie des paysans, ce ne serait pas normal. Partager la vie des ruraux c’est espérer ensemble un meilleur avenir. (extrait de Paysans africains)
Pour ton témoignage, Louis, merci et gloire à Dieu

« L’espérance ne déçoit pas puisque l’amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné ». dit Paul. Louis tu as espéré cent ans, maintenant tu vois Dieu en face ! Tu emmènes avec toi chez Dieu l’amitié de ceux qui t’ont connu et comme dit un couple d’amis protestants en parlant de toi : « Louis a été « colporteur » en actes de la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ ! Son humanité, son ouverture œcuménique, sa simplicité, sa fidélité à Dieu et aux hommes ont été des cadeaux pour nous tous, tout au long des années où il passait, presqu’incognito, se satisfaisant d’un verre d’eau, d’amitié et de partage fraternel…
A l’image de Son Maître, il a été pour nous tous « un ami fidèle et tendre » !
Louis, pour ta fraternité merci et Gloire à Dieu.

                                         Frère Edmond

Frère Marius Aubry 1921-2020
 
Quelques mots sur le parcours de celui qui nous rassemble aujourd’hui…
De nombreux messages nous sont parvenus de personnes qui auraient souhaité être présentes à cette célébration, mais confinement et handicaps obligent.
 
Marius était le dernier survivant de sa génération. Sa dernière sœur est décédée il y a quelques années et son beau frère,  97 ans, dépendant  demande beaucoup d’attention de la part de ses deux enfants Jean-Marie et Philippe, , ce qui explique leur absence aujourd’hui.,
Marius est né le 16 février  1921.  Il approchait donc de ses cent ans.., à Sémézances, en Côte d’Or une petite commune rurale  à l’ouest de Dijon. C’est là qu’il est scolarisé et travaille sur la ferme avec son père en polyculture .
 
Très vite, un jeune prêtre au service de la paroisse,  lui propose des rencontres de JAC (Jeunesse Agricole Chrétienne). Il y répond  et s’engage progressivement et deviendra responsable de l’équipe local.
Ce prêtre lui parle un jour des Frères  Missionnaires des Campagnes.  Il va prendre contact et  les découvrir. Et en novembre 1951, à 30 ans, il rejoint La Houssaye-en-Brie, Maison mère de cette jeune Congrégation fondée  quelques années plus tôt, par le Père Michel Epagneul, en 1943.
Après 18 mois de découverte et de préparation,  il prononce ses premiers vœux et rejoint la communauté de Canappeville dans l’Eure., il restera 2 années.
 
Puis c’est l’Indre, en 1955, à Urciers  où démarre une nouvelle communauté en plein secteur rural. De Urciers, la communauté va bientôt rejoindre Sainte-Sévère, le chef lieu du canton.  Il y restera jusqu’en 1977.
Durant toutes ces années, pour être présent et partager la vie des gens,  il est embauché comme ouvrier avec des formes bien diverses : on le retrouve dans l’équipe saisonnière qui mène la batteuse par exemple. Et à Sainte-Sévère il va se retrouver comme livreur de pain à faire la tournée dans la campagne. Les journées sont bien longues mais riches de contact. Et  il a à cœur d’avoir un petit mot gentil pour chacun.
Cette présence dans le milieu rural lui fait découvrir peu à peu la population des gens du voyage, nombreuse dans cette région. Il sait être attentif à leur divers besoins, n’hésitant pas à donner de son temps pour tenter de solutionner des  situations difficiles. Marius n’oublie pas qu’il est religieux et que c’est une façon de témoigner de ce qui le fait vivre.
En 1977, à 56 ans,  Marius rejoint Lorris, qu’il ne quittera plus. 43 ans de présence  :
- d’abord dans l’équipe responsable de la Pastorale du secteur, à la maison paroissiale 
- puis avec quelques Frères âgés, en location, dans la rue aux Chèvres, et en 1994, au 1 Faubourg de Montargis dans une maison spécialement aménagée pour des Frères âgés .
 
A Lorris, Marius continue son travail, surtout  près des gens du voyage. Il sillonne le Loiret (en 4 L).- Entouré d’une équipe de laïcs, il devient responsable de la Pastorale des Gens du Voyage pour le département. Avec les années il passera progressivement la main à d’autres.
- Et en  2018 c’est la Maison de retraite de Lorris, la Maison d’Émilie. qui l’accueille. Toujours souriant malgré sa surdité.
Un grand merci à tout le personnel.
 
Merci Marius pour tout ce que tu as apporté à tous ceux que tu as pu rencontrer. Ton sourire, ta gentillesse, le souci des autres, les dépannages multiples, transport par exemple. A travers ces petits gestes, c’est toute ta vie qui a e été missionnaire.

Depuis des années tu attendais sereinement ce grand passage. Te voici comblé, même si les circonstances sont difficiles.

                                                                                                                                                                                                    Merci Marius.

25 novembre 2020 - Lorris
Job 19,23-27a , Psaume 41-42, Matthieu 25,31-40

« Chaque fois que vous l’avez à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. »
C’est le texte d’Évangile de dimanche dernier.
C’est aussi notre choix pour évoquer dans cette célébration la vie et l’activité missionnaire de notre Frère.
Nous le savons tous, pour Frère Marius, « Ces petits qui sont mes frères » dont nous parle Jésus, ils avaient le visage des gens du voyage . Un Frère a calculé que Frère Marius s’est mis à leur service pendant 52 ans, dans l’Indre et ici dans le Loiret. Les gens du voyage et aussi tous ceux qui ont besoin d’être aidés et reconnus. Dans le courrier que nous avons reçu ces jours-ci, certains personnes témoignent de sa participation aux activités du Secours Catholique.
Avec la Pastorale des gens du voyage, Frère Marius a participé à de nombreux rassemblements et pèlerinages. Il en a accompagné et préparé aux sacrements, principalement le baptême.
C’est « le frère avec la 4L »…Il paraît que c’était comme çà que des gens connaissaient Frère Marius. Avec cette 4L, Frère Marius a fait beaucoup de déplacements et rendu de nombreux services.
Est-ce Frère Marius n’était aussi un de ces humbles ? Ce n’était pas une force de la nature. Il a connu la fatigue. Mais çà ne l’a pas empêché d’être actif. Pendant une vingtaine d’années, Frère Marius a vécu dans le Berry, au sud de l’Indre. Je me suis toujours demandé comment il a tenu le coup en faisant les battages dans les fermes, car c’était un métier dur. Plus tard il a fait les tournées du boulanger dans les villages. Le samedi, les tournées étaient longues et se prolongeaient jusque dans la nuit tombée. Le dimanche matin, nous voyions Frère Marius arriver à la prière avec de la migraine. Mais l’après-midi, il prenait la voiture et partait en visite auprès de ses amis les gens du voyage. Le soir, il nous revenait en forme : Conduire calmement et rencontrer ses amis voyageurs avait fait passer la migraine !
Je suis arrivé tout jeune frère dans cette communauté dans l’Indre où il y avait donc Frère Marius et Frère Louis Loiseau, tous les deux autour de cinquante ans. Voir vivre et vivre avec ces deux Frères aînés, bien enracinés dans leur vie de religieux, voir leur fidélité à la prière, leur présence au travail et aux activités missionnaires, vivre avec eux cette vie fraternelle, cela a été une bénédiction pour moi et souvent j’en ai rendu grâces au Seigneur.
« Je sais, moi, que mon rédempteur est vivant… Je le verrai face à face et il ne sera plus un étranger pour moi. » Ce texte de Job nous rappelle bien la foi de Frère Marius. Depuis longtemps, il était prêt pour cette rencontre avec son Seigneur ; On peut dire je crois qu’il attendait cette rencontre. Il nous disait : « ça va arriver un jour ». Dans ses dernières années au prieuré, il allait plusieurs fois dans la journée à l’oratoire prier et égrainer son chapelet. Et à la maison de retraite, les rares sorties de sa chambre, c’était pour aller dans le couloir, à un endroit d’où il pouvait voir la chapelle de la maison, et là il prolongeait la prière qu’il avait commencé dans sa chambre.
Nous aurions aimé fêter dans quelques semaines seulement les 100 ans de cet homme de foi, de cet homme de service et de charité. Rendons grâce ensemble pour cette vie entièrement donnée. Demandons au Seigneur de l’accueillir dans la plénitude de la Vie.

Frère Paul Fruchet

2020 Louis claudel
1921 - 2020
 
« Un juste, même s’il meurt, connaîtra le repos….  Devenu agréable à Dieu, il a été aimé…
Il a été enlevé de peur que le mal n’altère son jugement » Sagesse, 4,7-11
 
Frère Louis Claudel nous a quittés paisiblement dans la nuit du 20 au 21 février 2020 à l’âge de 98 ans, à la maison de retraite Joséphine Normand à Brienon.